A peine quelques semaines après le lancement officiel de la finance islamique que des banques publiques et privées se lancent dans une rude concurrence et entament des campagnes de marketing pour promouvoir leurs produits Halal. Automobile, appartement, appareils électroménagers, bien immobilier…, les offres que proposent les établissements bancaires dans le cadre des dispositions de la finance islamique sont diverses. Désormais, l’accès aux prêts bancaires pour les citoyens (classe moyenne) et les porteurs de projets d’investissement n’est qu’une question de temps. Pour réussir cette opération, les autorités publiques ont accéléré la cadence et mis en place le cadre juridique relatif à la création de banques et de compagnies d’assurances islamiques.
Certes, dans toutes les économies en difficultés, les facilitations de l’accès aux prêts bancaires et la canalisation de l’argent de l’informel sont un pas important pour redresser la barre d’une économie à la recherche de niches de croissance. Ce que les autorités publiques ont, semble-t-il, ignoré dans les débats sur la finance islamique c’est la question de la cherté des « prêts » Halal, dont le taux de marge bénéficiaire que proposent les établissements bancaires dans le cadre de la finance islamique dépasse le seuil des 6%, en plus de la culture du cash qui s’est enracinée dans la société. Une culture qui se traduit sur le terrain par la thésaurisation de l’argent dans les maisons et qui s’est accentuée après le lancement des mesures de confinement, le mois de mars dernier, provoquant une crise de liquidité, dont les conséquences sont encore visibles aujourd’hui.
Concernant les prêts Hallal jugés exorbitants, les spécialistes des finances estiment que la comparaison entre la marge bénéficiaire et le taux d’intérêt ne doit pas occuper une place primordiale dans les débats. Pour eux, la question la plus importante est comment rétablir la confiance perdue des citoyens en les établissements financiers, notamment après le scandale de la banque Khalifa, dont les victimes ne sont pas indemnisées à ce jour ? Pour ce qui est de l’efficacité de la finance islamique dans la lutte contre l’informel, les spécialistes affirment dans ce sens que le recours à cette option peut résoudre une partie de cette problématique, mais sans éradiquer le phénomène du marché informel qui exige une véritable volonté politique, des mesures et des mécanismes de modernisation du système bancaire pour suspendre complètement l’usage du cash sur le marché, et cela ne peut être possible que par la digitalisation du système bancaire.
Pour l’instant, les pouvoirs publics se contentent d’annoncer, depuis le mois de mars dernier, des programmes de réforme du système bancaire accompagnés d’une série de facilitations concernant l’ouverture des comptes bancaires et les transactions électroniques pour réduire la circulation de l’argent liquide sur le marché, mais l’application de ces décisions sur le terrain risque de prendre plus de temps que prévu.
En attendant la mise en place de ces réformes promises par les autorités publiques, une question se pose : l’introduction de la finance islamique en Algérie va-t-elle réussir à attirer et convaincre les Algériens de la nécessité d’introduire leur argent dans le circuit bancaire ? Les jours à venir nous répondront...